C’est la deuxième fois en l’espace de quelques mois que la question migratoire divise les partis politiques de la coalition au pouvoir en Autriche.
La querelle s’est enflammée jeudi dernier avec l’expulsion de Tina, une jeune fille de 12 ans, de sa mère, de sa sœur et d’une autre famille.
Une centaine d’officiers de police avaient défilé tôt le matin avec des chiens pour imposer l’expulsion des familles contre une farouche opposition des camarades de classe de Tina, des journalistes et des partis d’opposition de gauche.
L’Affaire Tina
Le ministre de l’Intérieur Karl Nehammer du Parti conservateur (ÖVP) a fait le choix de mettre juridiquement fin à une affaire qui aura duré 15 ans. Au cours de ces dernières années, la famille de Tina a eu à déposer sept demandes d’asile. Toutes ont été rejetées, en dernier ressort par le tribunal administratif en 2019.
Mais Tina, elle est née en Autriche, elle parle parfaitement l’allemand à la belle manière autrichienne; elle est par ailleurs élève dans un des lycées les plus renommés de Vienne, la capitale.
Die 12jährige #Tina, ein Tag nach ihrer #Abschiebung nach Georgien: „Österreich ist meine Heimat!“ #ÖVP-IM #Nehammer verteidigt die Abschiebung, kritisierte die Mutter und betonte, dass er keinen Änderungsbedarf bei den Abschiebungen sieht!https://t.co/vUpi9Ek6wf pic.twitter.com/NVWeqnj60W
— SerbInnen gegen Rechts (@serbinnen) January 30, 2021
L’obligation à présent de poursuivre dans son «pays d’origine» sa formation scolaire dans une langue qu’elle ne maîtrise qu’oralement, fait de Tina l’incarnation même des contradictions tragiques de toutes ces biographies issues de l’immigration clandestine. Ses camarades de classe se sont mobilisés pour s’opposer à son expulsion.
La querrelle
En Autriche, la coalition au pouvoir est composée de deux partis politiques avec des idéologies fondamentalement opposées : Les Verts Libéraux de la grande famille des partis de gauche d’un côté ; et de l’autre, le parti populaire autrichien (Österreichische Volkspartei, ÖVP) appartenant à la droite.
Des membres influents du parti des Verts Libéraux ont reproché au ministre de l’intérieur Nehammer (ÖVP) de vouloir, par cette action musclée, distraire l’opinion et de détourner son attention des difficultés au sein de son ministère.
Nehammer, quant à lui, soutient qu’il n’aurait fait que mis en exécution une décision de justice. En revanche, ses détracteurs soulignent la marge de manœuvre qu’aurait offerte le droit humanitaire dans la situation de la jeune Tina et de sa famille. Mais en même temps, le droit européen en vigueur oblige les États membres à renvoyer chez eux les personnes en situation irrégulière.
La sortie du Président Fédéral
Le Président Fédéral autrichien, Alexander Van der Bellen, s’est lui aussi prononcé sur cette affaire dans un message vidéo : « Je ne peux pas et ne veux pas croire que nous vivons dans un pays où cela est vraiment nécessaire sous cette forme», a-t-il déclaré, appelant à la raison et à l’humanisme dans l’action des organes de l’État. Des responsables politiques du parti conservateur ÖVP ont, pour eux, interprété les paroles du Président Fédéral comme du mépris envers l’État de droit.
« Ich kann und will nicht glauben, dass wir in einem Land leben, wo dies in dieser Form wirklich notwendig ist. » Bundespräsident Alexander Van der Bellen in einem Statement zu den heute Nacht erfolgten Abschiebungen. pic.twitter.com/un3DN5l3Zk
— A. Van der Bellen (@vanderbellen) January 28, 2021
En Autriche comme en Allemagne, le Président Fédéral est le Chef de l’État. Toutefois, il n’a pas de pouvoir formel dans la gestion concrète du pouvoir exécutif qui est en totalité du ressort du Chancelier ou de la Chancelière Fédéral(e).
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