Des sanctions contre Moscou ne suffissent plus, expliquait lundi Clément Beaune, le Secrétaire d’État français auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, à france Inter, une station de radio du service public français.
Le « NON » français
« Des sanctions, on en a déjà prises, on pourrait en prendre mais il faut être lucide, cela ne suffit pas ! … Il y a des protestations, il y a des sanctions, il faut aller plus loin. » expliquait-il.
À la question de savoir ce que le jeune Secrétaire d’État et proche d’Emmanuel Macron voulait dire par là, il retorqua : « Je pense que l’option Nord Stream est une option qui se regarde. Vous savez, c’est une décision aujourd’hui allemande, puisque c’est un gazoduc qui est en Allemagne. Et nous avons toujours dit que nous avons les plus grands doutes sur ce projet, en effet, dans ces conditions. »
La journaliste reprécisera la question : « Vous êtes favorable pour abandonner Nord Stream ». Clément Beaune de répondre : « Nous l’avons déjà dit, en effet. »
Répression en #Russie –@CBeaune, sur d’éventuelles sanctions européennes: « Il faut être lucide, ça ne suffit pas » #le79Inter pic.twitter.com/spWDXx5T7o
— France Inter (@franceinter) February 1, 2021
Le fait est cependant que Paris ne l’avait encore jamais dit. Dans tous les cas, Paris ne l’avait jamais dit aussi ouvertement. Quoi qu’il en soit, les choses semblent avoir changé. Clément Beaune exprime désormais « le plus grand doute » sur ce projet pipeline Russie-Allemagne, dont le chantier est pourtant achevé à presque 95%.
Mais l’on peut bien s’imaginer que le « NON » français, exprimé publiquement quelques jours avant le Conseil franco-allemand de défense et de sécurité (CFADS), n’est pas un hasard.
La raison avancée : Répression policière en Russie contre des manifestants pro-Navalny
Clément Beaune a justifié la position de la France par la répression policière contre des manifestants pro-Navalny en Russie. Mais ceci ressemble plus à un prétexte qu’à une réelle préoccupation quant au sort réservé au mouvement Pro-Démocratie en Russie. Ce changement (si subite) de position a, en effet, une longue histoire.
Russia braces for new street protests against jailing of Kremlin critic Navalny https://t.co/C0sVD9YYdc pic.twitter.com/w2iK9YDW1z
— Reuters (@Reuters) January 31, 2021
Le Président français, qui avait longtemps – jusqu’en été 2020 – vu d’un bon œil un éventuel partenariat franco-russe, semble avoir été profondément frustré par le manque supposé de fiabilité de Vladimir Poutine sur différentes questions telles que : la Syrie et l’Ukraine.
Il s’était brusquement détourné de Moscou en septembre, en qualifiant l’empoisonnement de l’opposant Alexeï Navalny de « tentative d’assassinat ».
Macron a besoin de l’aide et du soutien de Washington, notamment en Afrique
Mais l’opposant le plus ferme et le plus constant au pipeline Russie-Allemagne n’est pas Emmanuel Macron. Ce sont les États-Unis – Républicains comme Démocrates y sont catégoriquement opposés. Il semble clair que Macron, en s’opposant à son tour à la Chancelière, recherche un rapprochement avec Washington.
Le fait est que le Président français a besoin des Américains sur plusieurs fronts, notamment en Afrique.
- Le Sahel : Dans sa lutte contre le terrorisme international dans le Sahel, les États-Unis fournissent à la France des images aériennes sans lesquelles les troupes d’élite françaises au sol seraient pratiquement aveugles.
- Le Cameroun : Dans sa dernière résolution, le Sénat américain a particulièrement interpellé la France sur son manque d’engagement dans la recherche d’une résolution pacifique du conflit armé dans l’ouest anglophone. Paris, par son opposition au projet russo-allemand, espère éventuellement être moins mis sous pression sur cette question.
- Le Centrafrique : En Centrafrique, une guerre d’influence semble opposer la France à la Russie. Elle ne cesse de prendre de l’ampleur, et Paris pourrait bien avoir besoin du soutien américain pour s’en sortir. MN
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